« Selon vous, le sperme, ça a quel goût ? » C’est la question que nous avons posée sur Twitter, le 8 février dernier. Des gens ont fait des blagues. On a, par exemple, reçu
cet e-mail avec comme unique contenu :
« Potiroooooooooooon. »
D’autres ont répondu plus sérieusement. Cécile – les prénoms ont été modifiés – a décrit :
« C’est salé et ça sent l’eau de javel. Le goût ne me gêne pas mais la texture un peu. C’est chaud et un peu visqueux. Je trouve que c’est un peu amer. »
Hervé a quant lui parlé de sa femme :
« Pour le sperme, ça dépend si on mange plus salé ou plus sucré : ce sont les dires de ma femme ! »
« Vous reprendrez bien un peu de sperme ? »
Dans leur livre « La Mécanique sexuelle des hommes », Catherine Solano
et Pascal de Sutter, tous deux sexologues, évoquent cette question hautement culinaire.
« Il semble que ce que l’homme mange puisse influencer le goût et l’odeur du sperme. Ce qui paraît cohérent puisque l’alimentation influence l’odeur de la sueur, la saveur de la salive,
des baisers ou le goût du lait maternel. »
Les auteurs du livre reconnaissent cependant qu’« il existe peu d’études à ce sujet » et qu’« aucune ne remplit complètement les critères scientifiques ».
Il ne se privent pas pour autant de donner une petite liste des aliments qui « influencent peut-être le goût du sperme ». Du côté des gentils produits, il y aurait la prune, la
nectarine, le thé vert ou la camomille.
Côté méchants, comme d’habitude, c’est l’ail et l’oignon qui trinquent.
Le tableau des aliments, dans « La Mécanique sexuelle des hommes » de Catherine Solano et Pascal de Sutter, éd. Robert Laffont, mars 2011
Cette gamme d’aliments et de goûts vous donnera peut-être l’envie, comme un bon cuisinier, de faire des essais, de cuisiner du sperme comme un produit différent qui varie selon son terroir.
Si c’est le cas, vous pouvez lire ou relire cet article de Rue69 datant de
2009 et que nous avions sobrement titré : « Gastronomie : vous reprendrez bien un peu de sperme ? »
« Les urines, c’est sûr... »
« Le Sperme » de Gérard Tixier, éd. PUF, 1994
Pour Gérard Tixier – auteur du Que sais-je ? au meilleur titre de France : « Le Sperme » –,
l’influence des aliments sur le goût de la semence est un mythe.
« Physiologiquement, ce n’est pas possible. Si les composants du sperme passait dans les urines, ça pourrait l’être, mais ce n’est pas le cas.
Et heureusement d’ailleurs ! Le sperme comme le sang sont des substances très protégées dans l’organisme. Vous avez déjà vu quelqu’un vous dire que le sang changeait de goût ou
d’odeur ? »
Il précise donc que le goût du sperme ne change que s’il est concentré, ou pas. Mais alors d’où viennent ces croyances ? Réponse de Gérard Tixier :
« Je ne sais pas... Les urines, c’est sûr qu’elles sont modifiées, mais le sperme non. Certaines personnes consomment peut être de l’urine. »
Parce que nos cours de biologie sont loin, et qu’on pense pas mal de bêtises : voici cinq clichés sur le sperme démontés !
1
Le sperme n’est pas salé
La plupart des personnes à qui l’on demande quel goût a le sperme ont tendance à répondre qu’il est salé. Mais Gérard Tixier fait remarquer :
« Le sel, c’est du chlorure de sodium, or il n y en a pas dans le sperme. Il y a sûrement une confusion avec l’acidité. »
2
Seulement 10% de spermatozoïdes dans le sperme
Gérard Tixier rappelle que le sperme est un « cocktail séminal ».
« Le sperme est très hétérogène. Il n’est composé de 10% de spermatozoïdes, ce qu’on appelle le semen.
Le reste, ce sont des productions de liquides par les diverses parties de l’appareil génital, des glandes annexes, et des liquides testiculaires. »
La prostate produit par exemple un tiers de ce liquide. C’est d’ailleurs en y passant que les spermatozoïdes « reçoivent une cascade de liqueurs diversement aromatisées et
revigorantes » et deviennent le sperme.
3
Les hommes aussi ont un cycle
Le sperme, une fois qu’on en a, ça ne s’arrête plus : ça dure même toute la vie. Dans son livre, « Le Sexe de l’homme » (éd. Livre de Poche, 2005), Ronald Virag estime que c’est
l’un des clichés les plus répandus sur le sperme : le croire « porteur d’une sorte d’énergie vitale qui diminuerait avec le temps et la répétition des émissions ».
Il cite ainsi Flaubert pour qui :
« Une once de sperme perdu, c’est plus que deux litres de sang. »
Et ben alors, Gugu ? Fallait pas se faire du souci comme ça. Pour refaire le plein après une éjaculation, il suffit de cinq jours. Le cycle de fabrication des spermatozoïdes est quant lui
de 74 jours. Au téléphone, Gérard Tixier s’amuse :
« Comme les femmes, les hommes ont aussi un cycle, sauf qu’il est sans interruption. »
4
Orgasme, érection et éjaculation ne sont pas liés
Les clichés ici sont donc les suivants :
- quand on a un orgasme, on éjacule ;
- quand on éjacule, on est forcément en érection.
Réponses claires et simples de Gérard Tixier :
« Il existe des éjaculations sans orgasme. L’éjaculation ne dépend pas non plus de la vigueur de l’érection. D’ailleurs, on constate des éjaculations sur verges molles. »
5
Pas de VIH dans le sperme, mais du VIH sur le sperme
Explications par Ronald Virag dans « Le Sexe de l’homme » :
« Les spermatozoïdes d’un homme infecté ne sont pas eux-mêmes infectés car le virus VIH ne peut le pénétrer. Par contre, il peut s’accrocher à eux et se laisser transporter pour
transmettre l’infection. »